Pour l’eau ne coulant plus aux fontaines de pierre,

Pour l’enfant affamé au ventre distendu

Dont l’ultime repas remplissait sa cuillère,

Avec dix grains de riz qu’un vieux sac a perdus

Et pour le chaud simoun qui brûle les paupières

Il faut que de la Croix Jésus soit descendu.

 

Pour le papier-monnaie nous servant d’Evangile

Dans ce monde où l’argent est si mal répandu

Par des chiens affamés au regard de vigile

Ayant pignon sur temple et ventre bien dodu

En exploitant l’esprit des hommes si fragiles.

Il faut que de la Croix Jésus soit descendu.

 

Pour les poissons crevés dans l’eau de la rivière,

Pour l’oiseau englué dans la nappe étendue

Par le bateau de la puissance pétrolière.

Pour les arbres martyrs que la hache a fendus

Et dont la mort nous fait des forêts cimetières.

Il faut que de la Croix Jésus soit descendu.

 

Pour les bras arrachés et pour les vies broyées

Par quelques fous de Dieu aux actes assidus

Qui malgré les horreurs ne vont s’apitoyer.

Pour tous les morts passés et pour ceux attendus

Dans un carnage où la raison est foudroyée.

Il faut que de la Croix Jésus soit descendu.

 

Pour les beaux orateurs de la vie politique

Ne sachant pas couver les promesses pondues

Et pour la république aux couleurs exotiques

D’une bananeraie aux fruits inattendus

Réservés seulement aux classes dynastiques.

Il faut que de la Croix Jésus soit descendu.