Quand dans l'air du salon la musique s'éveille
Aux accents de Mozart, aux notes de Chopin,
Je vois par ma lucarne un monde qu'on repeint
Aux couleurs des accords caressant mon oreille.
Le piano colore au blanc de chaque touche
Un monde enluminé de croches en ruisseau
Suivant la barcarole au-dessus du vaisseau
Que mène un gondolier, le refrain à la bouche.
Arrive le zéphyr qu'un violon devance,
Il roule en tourbillons les feuilles des jardins,
Puis le trait de l'archet les aligne en andains
Pour poser sur leurs corps un instant de silence.
La cadence reprend pour la danse des heures,
Tintinnabulements sortant d'un carillon
En fugace tempo d'un vol de papillon
Annonçant, Gioconda, que d'ici peu tu meures.
Contrebasses geignant la rhapsodie hongroise
Noircissent les stratus avant que les hautbois,
Les altos endiablés qu'on croyait aux abois
Allument un cancan de butte Montmartroise.
Puis monte un lamento d'une femme amoureuse
Aria qui flétrit la fleur Violetta.
Chant de peine et d'amour de la Traviata
Dont l'écho me façonne une âme douloureuse.
La musique et le chant m'emportent en voyage
Où vaque mon esprit sur fond de fugato
Qui ne m'appartient plus et suit en spiccato
La fugue le drainant au fil de son sillage.